lundi 30 novembre 2009

Bienvenue à Zombieland : appétissant... mais frugal.





Quel bonheur, quelle sensation de liberté que de se rendre un lundi après midi au cinéma pour se goinfrer de popcorn et dévorer Zombieland au Max Linder (celui de Paris hein, pas celui de Ribérac en Dordogne), les pieds négligemment vautrés sur le bord de la mezzanine quasi déserte.

Mais mis à part ce trip jouissif, que vaut donc ce film dont j'avais raté toutes les projections de presse et à propos duquel j'ai pu lire des critiques globalement positives ?

Hé bien les aminches je dirais.... que je savais pertinemment que je n'allais pas voir un chef d'oeuvre. Voire même que Zombieland était franchement inégal à en croire certains échos, mais malgré tout foutrement sympatoche. Au final, j'ai vu exactement le film que je m'attendais à voir, avec cependant une petite pointe de frustration par rapport au secret espoir d'être agréablement surpris. Ben vi, exactement comme lorsqu'on est persuadé de se prendre un rateau avec une bombasse en soirée, mais qu'on y va quand même parce qu'on ne sait jamais sur un malentendu... jusqu'à ce que la réalité du rateau vous fracasse le tarin.

Le miracle ne s'est donc pas produit avec Zombieland et le générique de fin confirme l'impression d'un film culte avorté pour cause de scénario paresseux. Et pourtant, j'ai de l'affection pour ce cousin yankee du britannique (et plus inventif) Shaun of the dead. Comment en effet ne pas éprouver une irrépressible sympathie pour un film qui démarre plein pot par l'un des génériques les plus extraordinairement jouissifs de cette année ? Dans cette toujours aussi sublime salle du Max Linder, entendre le colossal From whom the bell tolls de Metallica en Dolby DTS, tandis que sur l'écran panoramique géant défile un montage hilarant d'humains coursés au ralenti par des zombies hystéros, relève du nec plus ultra de l'expérience orgasmique geek ultime. Une quintessence rare de plaisir cinéphilique et musical. Un pur shot de bonheur brut dont l'effet immédiat sur votre serviteur fut de le faire headbanger et taper du pied tout seul dans son siège comme un psychopathe. Dommage que par la suite, le film ne retrouve que parcimonieusement la perfection et l'intensité de cette parenthèse de grâce bourrine au cours de ses 80 minutes à la fois trop courte mais aussi, hélas, parfois longuettes.


L'introduction nous plonge directement au coeur du chaos. L'apocalypse s'est déjà abattue sur le monde, transformé en "Zombieland" en quelques jours comme nous l'explique en voix off le jeune héros, Columbus (joué par Jesse Eisenberg). On apprendra plus tard que le virus de la vache folle n'est pas étranger à l'épidémie (portnawak mais osef). Je tombe alors sur un second motif de bienveillance : notre survivant frêle et pubère nous parle de sa vie d'avant, nous expliquant que c'est sa condition de "no life" qui lui a permis d'échapper aux macchabées en folie. Vie sociale réduite à boulottage de pizzas devant World of Warcraft + pas vraiment d'attache affective : rien de tel pour affronter efficacement une invasion de zombies ! On pourrait certes reprocher au film de tomber dans une énième caricature du geek mais, bizarrement, je l'ai ressenti au contraire comme une sorte d'hommage à notre culture. Colombus n'est pas un demeuré dont rit le réalisateur, c'est même plutôt l'inverse : il s'agit d'un garçon sensible, vif et attachant. Et comme tout bon geek maniaque, Columbus fait des listes, enfin une surtout : celle des règles impératives pour survivre dans Zombieland, qui reviendront en tant que leitmotiv comique tout au long de l'intrigue.

Rapidement, Columbus croise la route de Tallahassee (Woody Harrelson), cowboy solitaire particulièrement remonté contre les morts-vivants. Le duo rencontrera par la suite deux jeunes soeurs (Wichita et Little Rock) résolument antisociales et, après quelques bisbilles, la mauvaise troupe se dirigera soudée vers un parc d'attraction de Los Angeles dont la rumeur prétend qu'il est protégé des zombies.

Problème : toute la partie du film comprise entre le voyage vers la côte ouest et le final dans le parc souffre d'une très grosse baisse de rythme. Et lors de ce ventre mou enfle le sentiment d'un potentiel énorme malheureusement jamais exploité par les scénaristes et le réalisateur. Il se passe finalement assez peu de choses au cours du périple de Columbus et Tallahassee, le quota de "zombiekill" reste bien modeste et d'ailleurs, étrangement, aucune scène ne nous montre un plan vraiment effrayant de foule zombiesque massive. Les maccab' surgissent presque au compte goutte ou par grappes relativement chiches (le budget figurants a été bouffé par le cachet d'Harrelson ou bien ?).


La pauvreté du script, malgré ses fulgurances éparses, nous donne parfois l'impression de visionner un épisode pilote de série télé lambda (Zombieland fut d'ailleurs conçu à l'origine pour le petit écran) où certaines séquences sont plaquées ici et là pour faire gagner du temps à une intrigue aux enjeux assez plats. Passé le premier effet fun, toutes les scènes se déroulant dans la somptueuse villa d'une star hollywoodienne culte (et NON je ne spoilerai pas, même si le film est déjà sorti), ne dépassent que rarement le stade de la bonne idée.

Il faut vraiment attendre le climax dans le parc d'attraction pour qu'enfin la tension et l'excitation reprennent leurs droits, tandis que la mise en scène use adroitement du potentiel kinétique des grands huit et autres manèges à sensations fortes. En clair : ça charcle enfin un peu dans le dernier quart d'heure ! Une paresse générale à l'image du jeu de Woody Harrelson : il est évidemment impeccable en bouseux fine gâchette, mais sans jamais forcer son talent. Pas de réel moment d'anthologie, ni de scène absolument culte où la folie de son personnage serait poussée jusqu'au bout (j'ai tout de même bien ri à la séquence du banjo).


Pourquoi dés lors trouver sympathique Zombieland malgré toutes ces frustrations ? Parce qu'à titre personnel, je ne peux que décerner la médaille du larsen à un film qui me balance dans les oreilles Metallica, Van Halen ("Everybody wants some") et Blue Oyster Cult ("Don't fear the reaper") en cours de projection, sans oublier Ray Parker Jr, clin d'oeil vraiment bien vu aux geekos nostalgiques des années 80. L'ensemble, fun et sans prétention, se laisse regarder sans déplaisir et les intentions de l'entreprise sont éminemment estimables, à l'image de ce groupe de héros paumés qui finiront par former malgré eux une cellule familiale. Et puis les maquillages gores sont généreux plutôt bien exécutés. Et puis Emma Stone est carrément smoking hot. Et puis... ben je crois que j'ai fait le tour ! A vous de voir si c'est suffisant pour vous déplacer en salles. Ou finalement vous convaincre d'attendre la sortie en DVD pour une soirée popcorn avec les potos. Il parait qu'une suite est déjà à l'étude. Pourquoi pas mais faudrait un peu me muscler tout ça, les gars...

PS : restez tout de même jusqu'aux dernières gouttes du générique de fin. On y cause de Sartre. Si.

Bienvenue à Zombieland (Zombieland), de Ruben Fleischer. Actuellement en salles.

End of transmission...



jeudi 19 novembre 2009

mardi 10 novembre 2009

Les chéris de ces geeks, ep. #6 : Fred Ward


Les aminches, assez finassé, foin de palabres : oui j'ai encore traîné ces dernières semaines, j'avoue, je suis indigne et mérite d'être roulé dans la fange avec les trois petits cochons !

Raison de plus pour ne pas perdre davantage de temps en vaines explications zoiseuses. Et pour commencer cette nouvelle session de posts sur JPFM : un petit "Chéri de ces geeks", ça faisait longtemps tiens ! L'élu du jour : Fred Ward.

Fred Ward, Fred Ward.... LE second couteau buriné du cinéma US. Front bas, nez de mi-lourd fracturé plusieurs fois lors de sa période ring, mâchoire granitique plantée au sud d'un faciès de coyotte au regard aussi aiguisé qu'une lame crantée de John J. Et une voix. Une putain de voix rauque shootée aux octaves, jamais aussi intimidante que lorsqu'elle se fait rugissement tapis dans l'ombre, à la hauteur des rôles de dur à cuire dans lesquels le cinéma l'a généralement cantonné. Ha ben oui, clairement pas une fiotte de posters à la Jude Law, l'ami Fred. Bon sang mêlé irlandais et cherokee ne saurait mentir !

Il aura 67 ans ce 30 décembre mais l'escogriffe sévit toujours sur les écrans, le plus souvent dans de séries télé (les groupies de Grey's anatomy n'ont sans doute pas remarqué sa belle performance récente dans le rôle du père de Denny Duquette). Il a également fait une apparition cette année dans la série de la chaîne Showtime, United States of Tara et dans le thriller L'Affaire Farewell, de Christian Carion (où il incarne Ronald Reagan. Pas vu mais dommage !). Il se fait plus rare , le Fred, mais à chaque fois que je recroise sa gueule de vieux loup de mer émacié, mon coeur fait boum comme à chaque retrouvaille avec un chéri de ces geeks.


Quand ai je donc déjà entendu parler de ce comédien si attachant pour la première fois, voyons voir... Oui ! Retour vers l'enfer. Uncommon Valor en V.O. C'était en 1983, mon père nous avait emmené voir au Gaumont Marignan des Champs Elysées ce chouette action movie signé Ted Kotcheff juste après Rambo, dans lequel un colonel du corps des Marines (Gene Hackman) emmène un groupe de mercenaires récupérer son fiston resté prisonnier au Laos après la guerre du Vietnam. Dans le film, Fred Ward était Wilkes, l'un des six salopards cornaqués par Hackman. Dans mes souvenirs, Wilkes souffrait d'un syndrome post traumatique après avoir zigouillé toute une famille viet dans un tunnel plongé dans l'obscurité, prenant la dite famille pour des soldats vietcongs (putaing quel cong ! Pardon...). Dans le film, une séquence assez glaçante montre Wilkes raconter avec force détails ce macabre souvenir à ses camarades de mission. Et leur rappeler qu'à tout moment, d'incontrôlables crises de panique peuvent s'abattre sur lui, breakdown irrépressible aliénant tout le reste, corps et âme. Voilà bien la signature de Fred Ward : la virilité fissurée par la peur.

Retour vers l'enfer, de Ted Kotcheff (1983). Fred Ward est le second en partant de la gauche.
Un cliché beau comme l'odeur du napalm le matin au réveil...


La même année que Retour vers l'enfer, l'acteur récidivait dans ce registre du costaud qui craque en composant l'astronaute Gus Grissom dans L'Etoffe des héros, chef-d'oeuvre de Philip Kaufman. Dans ce film, comme dans Retour..., Ward prouve qu'il n'est pas seulement une "gueule" mais aussi un merveilleux interprète bien plus subtil que ne le laissent deviner ses traits rugueux. La scène où Grissom le fier à bras se laisse peu à peu gagner par la claustrophobie dans sa capsule spatiale perdue en mer, dans l'attente d'être récupéré, vaut son pesant de sourde montée d'angoisse. Cruelles minutes d'humiliation lorsque, devant les caméras de la nation, Grissom pète un cable et saute à la mer sans attendre son hélitreuillage. Et Ward de savoir si bien nous faire ressentir la honte masquée de son personnage lorsque le président des Etats-Unis ne daigne pas se déplacer pour l'hommage traditionnellement rendu à chaque astronaute après un vol. Sévère punition.

Au premier plan : Fred Ward dans le rôle de Gus Grissom,
flanqué des six autres membres du programme Apollo
dans L'Etoffe des héros de Phil Kaufman (1983).
Un cliché beau comme la conquête spatiale.


Né Freddie Joe Ward à San Diego en 1942, Fred Ward avance un sacré background. Je ne parle même pas de son bagage de vie - trois ans dans l'US Air Force jusqu'à l'âge de 24 ans, puis une courte parenthèse en boxe et même un job de bûcheron en Alaska si l'on en croit Wikipedia. Par background, j'entend plutôt ses références de comédien. Le mec a étudié son art au réputé Herbert Berghof Studio de New York (d'où son sortis, au hasard, De Niro, Anne Bancroft, F. Murray Abraham, Faye Dunaway, Jack Lemmon, Sigourney Weaver, Barbra Streisand, Jean-Pascal de la Star Ac'... ha non tiens!). A l'époque, Ward payait ses cours en turbinant ici comme concierge, là comme démolisseur. Au début des années 70, on le retrouve à Rome où il gagne sa vie en doublant en anglais des westerns spaghetti et en jouant , en 1973 et 1974, dans deux téléfilms signés Roberto Rossellini. Pas mal pour un ours mal léché ! Robert Altman ne s'y trompera pas, bien plus tard, en engageant Ward dans The Player (1992), Short cuts (1993) et sa série télé Gun (1997).

Campeur alcoolo au coté de Huey Lewis dans Short Cuts, de Robert Altman (1993).

C'est à Don Siegel que Fred Ward doit son premier rôle marquant, un taulard dans L'Evadé d'Alcatraz au côté de Clint, en 1979. Deux ans plus tard, les amateurs de pelloche à poigne le remarqueront de nouveau en voyou de la Garde Nationale dans le prodigieux Sans Retour (Southern Comfort) de Walter Hill. Un épatant survival en plein bayou, bercé par les accords de slide de Ry Cooder, que je vous recommande chaudement. En 1985, j'ai raté Remo, sans arme et dangereux, une comédie d'action entièrement bâtie sur les épaules de Ward et qui aurait dû propulser sa carrière via un héros de films récurrent à la James Bond. D'ailleurs, le réalisateur n'était autre que Guy Hamilton, oui celui de quatre 007 dont Golfinger et Les Diamants sont éternels. Hélas pour Ward, Remo s'effondra au box office, scellant le destin d'éternel second couteau de ce magnifique acteur. Fâcheux mais pas grave. Jamais complètement disparu des radars, il a continué de nous régaler de ses rictus de redneck tout au long de sa filmo suivante, comme dans le culte Tremors, de Ron Underwood (1990), mais aussi Bob Roberts de Tim Robbins (1992) ou encore la comédie Sweet Home Alabama de Andy Tennent (2002), avec Reese Witherspoon.

Sans retour, de Walter Hill (1981) : il joue Lonnie Reece,
beauf bas du front et dangereux qui aura bientôt affaire à Powers Boothe...



Timerider, de William Dear (1983) : série B sympa où Fred Ward incarne
un motard propulsé en plein plein Far West.
On retrouve dans le film Peter Coyote, qui avait aussi joué dans Sans Retour.



Bouseux buteur de limaces géantes dans Tremors de Ron Underwood (1990).
A l'extreme droit sur la photo (mais pas dans la vie, hein)



Alors si d'aventure certains d'entre vous - je cause aux plus jeunes, là - n'avaient pas encore remarqué l'existence de cette figure chère à la geek culture (ne serait ce que pour Sans Retour/Retour vers l'enfer/Timerider/L'Etoffe des Héros/Tremors), je dis : à vos DVD, comblez moi ce manque culturel et chantez les louanges du vieux Fred sur la toile, il mérite notre reconnaissance au centuple. Exécution !


End of transmission....